L’amphithéâtre de FREJUS

Reportage TF1, Aout 2010


Résumé : Le chantier de rénovation des arènes de Fréjus suscite la polémique, entre associations qui dénoncent une défiguration des lieux, et la Mairie qui veut redonner vie à cet amphithéâtre en ruines.

NDLR : généralement on parle d'amphithéâtre et non pas d'arène

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Près de huit millions d’euros : c’est le coût partagé entre l’Etat (à 50 %), la Région Provence-Alpes-Côte-d’Azur (PACA), le département du Var et la Ville de Fréjus pour le massacre d’arènes vénérables du Ier siècle. Les travaux entrepris, ces gradins dégradants dont les photos sont aujourd’hui facilement consultables dans la presse, sont tant étonnants qu’on peinerait à les croire réels si l’on avait déjà en tête d’autres exemples malheureux d’affreuses verrues de ce genre, comme au château de Falaise.

Promoteurs de rentables spectacles contre « amateurs de vieilles pierres », comme certains appellent ceux qui trouveraient encore ces arènes belles par elles-mêmes sans qu’il soit besoin de les habiller d’une grise chape de béton lisse : c’est la loi du plus fort qui l’emporte. Une couverture intégrale qui masquera totalement les structures antiques et permettra d’accueillir un public toujours plus nombreux en respectant les règles de sécurité actuelles. On sait maintenant qui décide, de la Réunion des musées nationaux ou de la préfecture. Le silence de ceux qui ont fait profession d’aimer les vieilles pierres est d’autant plus assourdissant. On apprend seulement que l’architecte des monuments historiques en charge du projet a trouvé le travail de conception difficile. On l’imagine… Mais alors, pourquoi l’avoir mené ? Pourquoi n’avoir pas tout simplement rasé le site, ce qui aurait eu le mérite de la clarté ?

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Depuis quelques semaines, une polémique gronde autour des travaux de restauration des arènes de Fréjus (Var). Le bétonnage des gradins, pourtant validé par les Monuments historiques, suscite l'indignation des défenseurs du patrimoine.


Un chantier, des grues, et des gradins antiques recouverts de béton armé. C'est ce qu'on peut voir sur les photos de Pauline Michaut, membre d'une association de défense du patrimoine Les amis de Saint Raphaël et Fréjus qui alerte depuis plusieurs semaines les médias sur «une transformation de notre patrimoine historique qui ne dit pas son nom ».
«C'est un véritable massacre patrimonial» pouvait-on lire dans le journal des Arts daté du 9 juillet 2010 au sujet des travaux de restauration des arènes de Fréjus, monument historique classé depuis 1840.

Pourtant, ces travaux de restauration, menés par la mairie de Fréjus, ont été approuvé en 2005 par la commission nationale des monuments historiques puis validé par la direction régionale des Affaires culturelles (DRAC) de Provence-Alpes-Côte d'Azur (PACA) et le ministère de la Culture. Le chantier a même été confié à Francesco Flavigny, architecte en chef des monuments historiques, salué pour son travail par les défenseurs du patrimoine.

«Pour l'instant, le coffrage n'a pas un aspect définitif. Ca peu choquer, mais le béton blanc va être habillé» se défend-on à la mairie.

A la DRAC, le discours se veut également rassurant. François Brouat, le directeur de la direction régionale des Affaires culturelles explique que le monument était particulièrement dégradé, plus que les arènes d'Arles ou de Nîme. « Notre partis pris est de protéger l'architecture en recomposant les arènes à partir de matériaux modernes. Le dispositif mis en place est réversible, il n'altère pas le monument d'origine » précise-t-il.

Le chantier, dont le budget s'élève à 8 millions d'euros, est financé pour moitié par l'Etat. Les travaux doivent en principe être achevés au printemps 2011 en vue d'accueillir des spectacles l'été prochain.

Aux yeux des défenseurs du patrimoine, ce n'est pas tant le béton, matériau moderne, qui est remis en cause, mais bien son utilisation, en effet, peu esthétique. Au cœur des arènes, s'affrontent donc deux façons de concevoir notre rapport aux vestiges du passé et à notre patrimoine historique et culturel.

Le point de vue de la DRAC de PACA

François Brouat est le directeur de la direction régionale des Affaires culturelles (DRAC) de Provence-Alpes-Côte d'Azur (PACA)

Que pense la DRAC du chantier des arènes de Fréjus ?

Il faut d’abord savoir que c’est nous qui instruisons le dossier et qui avons donné l’autorisation des travaux entrepris sur les arènes. Le projet de restauration n’a donc pas été décidé à la légère. Il l’a été par des gens très compétents après avis de la Commission nationale des Monuments historiques. J’insiste aussi sur le fait que Francesco Flavigny est un architecte éminent, qui n’est pas n’importe qui, comme le montrent ses réalisations antérieures.


Il faut par ailleurs souligner que le chantier des arènes de Fréjus rentre dans le cadre d’un plan Etat-Région pour le patrimoine antique. Financé à 50 % par l’Etat, ce plan permet à des communes de PACA de mener des travaux de restauration importants sur leurs monuments, qu’elles ne pourraient pas entreprendre seules. Cela a notamment été le cas à Arles (pour les arènes), à Nice (pour les ruines de Cimiez) et à Fréjus.

Au départ, quelle était la philosophie du projet de Fréjus ?

Celles-ci, très ruinées, continuaient à se détériorer. Elles n’avaient plus de gradins, sauf ceux reconstruits à la période moderne. Alors, c’est vrai, il y a eu un parti pris radical : celui de protéger la partie antique et de pouvoir continuer à utiliser le monument comme lieu de spectacle. On a donc décidé de reconstruire des gradins au-dessus des structures anciennes. Il s’agissait de reprendre l’objectif initial du monument romain, lieu de spectacle, en travaillant avec des matériaux modernes.

Ce faisant, n’a-t-on complètement modifié et reconstruit l’amphithéâtre ?

Je le répète, le projet préserve l’intégrité du monument et son architecture initiale. De plus, il est important de préciser que le dispositif actuellement mis en place est réversible. Ultérieurement, si on souhaite l’ôter, cela est parfaitement possible.

Certains pensent qu’avec ce projet, la ville de Fréjus souhaite "doper" sa fréquentation touristique…

Ce n’est absolument pas le cas. Fréjus dispose d’un patrimoine gigantesque et mène une politique très active de protection dans ce domaine.

Et quand le journal La Tribune de l'Art parle de "massacre patrimonial", que répondez-vous ?

Cela rentre dans le cadre d’un débat sur le patrimoine commun. Débat qu’il est toujours important d'avoir.

Avant l'occupation romaine, le site de Fréjus fut probablement occupé par un peuple "celto-ligure". La ville de Forum Julii (Iulii pour les puristes), mot-à-mot le "marché de Jules" (César), fut fondée vers 43-49 avant notre ère par le grand Jules. Ce dernier entendait ainsi punir Massalia la grecque qui avait eu le mauvais goût de se ranger aux côtés de son ennemi Pompée (ce qui entraîna d'ailleurs la chute de la cité phocéenne).

Les stratèges romains avaient compris tout l'intérêt qu'ils pouvaient tirer du site pour en faire un port. Sous Auguste, Forum Julii est la seule base navale de la flotte militaire de Gaule. Cité maritime, la Fréjus antique est aussi un important centre économique (d'où son nom).

Devenue chef-lieu de la nouvelle province pro-consulaire de Narbonnaise, elle va peu à recevoir tous les attributs d'une ville puissante avec, notamment, son amphithéâtre, son théâtre, ses thermes. Autant de monuments dont les ruines sont parvenues jusqu'à nous.

L'amphithéâtre date de la fin du Ie siècle après J.C. Mesurant 113 de long sur 85 de large, il pouvait accueillir jusqu'à 12.000 spectateurs.

L'actuel chantier de restauration a été précédé d'une campagne de fouilles menée par une équipe d'archéologues de la ville. Cette fouille a notamment permis de dégager une série de caniveaux attestant qu'à l'époque romaine, les arènes étaient alimentées en eau. Elle a également permis de mieux comprendre comment le monument a été construit. Et comment il fonctionnait.

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Source France 3 Côte d'Azur

Var-Matin :